Il y a des rêves que l’on poursuit longtemps, et puis un jour, surgit le rêve d’âme : celui qui ne cherche pas à briller, mais à nous relier.
Il y a des rêves qui nous habitent si profondément qu’on pourrait croire qu’ils sont faits pour nous.
Des élans si forts qu’ils deviennent presque des évidences.
À 25 ans, je me suis dit : je veux devenir sage-femme.
Accompagner les naissances, participer à ce moment unique où une vie bascule du dedans au dehors…
C’était plus qu’un métier qui m’appelait. C’était un engagement intime, une révolte douce contre un monde trop dur, un désir profond d’être là, au seuil, pour préserver la sensibilité, la sécurité, le lien.
Je croyais alors avoir trouvé mon rêve d’âme.
Et pourtant, rien ne s’est mis en place tout de suite. Il a fallu des années, des détours, des essais, des portes fermées.
Il a fallu aussi que je me trompe – ou du moins, que je me laisse guider ailleurs.
Avec le recul, je comprends que ce rêve n’était pas faux. Il était juste incomplet. Il me montrait déjà quelque chose de fondamental, mais pas encore avec la bonne netteté.
Comme une toile qu’on croit achevée, et qu’on reprend des années plus tard avec un nouveau pinceau, un nouveau regard.
À l’époque, je ne parlais pas encore de rêve d’âme.
Je n’avais pas encore posé ces mots-là.
Mais en moi, quelque chose vibrait très fort : le désir de contribuer à un monde où l’on naît autrement.
Plus doucement. Plus en lien. Plus en confiance.
Devenir sage-femme, pour moi, ce n’était pas un métier.
C’était une manière de réparer quelque chose d’injuste : cette violence invisible mais réelle que vivent tant de nouveau-nés en franchissant le seuil.
Je portais en moi une douleur très vive – celle de voir un être humain empêché, dès ses premiers instants, d’être pleinement lui-même.
Empêché par les protocoles, les peurs, les pressions extérieures.
Et ça me bouleversait.
Je voulais être là, à ce moment-là, pour que la naissance ne laisse pas de trace traumatique.
Pour que l’enfant puisse s’ouvrir au monde sans se contracter.
Pour que la mère puisse sentir qu’elle a en elle la force de mettre au monde, sans qu’on lui vole ce pouvoir.
Ce rêve-là, je l’ai porté pendant dix ans.
En silence. Sans le mettre en mouvement tout de suite.
Comme si quelque chose en moi savait qu’il n’était pas encore temps.
Vers 35 ans, l’appel s’est à nouveau imposé.
Cette fois, je suis passée à l’action : j’ai cherché, je me suis formée, j’ai choisi une maternité réputée pour son approche la plus respectueuse possible.
J’y suis allée avec l’espoir de me rapprocher de ce que j’avais toujours senti juste.
Et pourtant…
Même dans ce lieu choisi avec soin, quelque chose résistait.
Je n’ai pas retrouvé l’élan que j’avais imaginé.
Ce n’était pas un rejet, ni une claque brutale. Plutôt une dissonance douce mais tenace.
Une impression que ce que je venais chercher ici… n’y était pas vraiment.
Alors j’ai bifurqué.
Je me suis intéressée au rôle de doula. Mais à l’époque, n’ayant pas d’enfant, ce n’était pas possible.
J’ai continué à chercher. Je me suis impliquée dans des collectifs autour des maisons de naissance.
Je suis allée jusqu’à faire un DU (Diplôme Universitaire), avec un mémoire sur l’haptonomie – ce langage tactile qui relie parents et bébé dès avant la naissance.
Et là encore, des obstacles.
Des prérequis auxquels je ne répondais pas.
Des formations qui m’étaient inaccessibles.
À chaque fois, la porte s’entrouvrait… puis se refermait.
Comme si la vie me disait : tu es proche, mais pas encore au bon endroit.
Un jour, presque par hasard, un livre m’est tombé entre les mains.
Ou plutôt, je suis tombée sur lui comme on tombe sur un signe qu’on ne cherchait pas.
Il s’intitulait L’accoucheur d’âmes, d’André Grobéty.
Je ne me souviens plus exactement comment je l’ai trouvé.
Je me souviens toutefois très bien de ce que j’ai ressenti : une résonance immédiate, presque viscérale.
Je ne parlais plus que de ce livre. Je disais autour de moi qu’il était exceptionnel, évident, profondément juste.
Aujourd’hui encore, je ne l’ai plus en main… et il a laissé une empreinte que je n’ai jamais oubliée.
Ce que ce livre est venu toucher en moi, c’est la même fibre que celle qui m’avait poussée vers la naissance physique… à un autre niveau.
Ce n’était pas l’enfant que je voulais accompagner.
C’était l’être.
Pas le nouveau-né, plutôt la part de chacun qui aspire à renaître à lui-même.
Celle qui a été abîmée, conditionnée, réduite. Et qui attend, tapie quelque part, qu’on l’aide à se remettre au monde.
À ce moment-là, tout s’est déplacé.
J’ai compris que mon rêve n’était pas faux – il parlait juste un autre langage.
Celui de la transformation intérieure.
De la libération d’être.
De la renaissance.
À l’époque de ce rêve initial, je ne connaissais ni le développement personnel, ni les approches spirituelles.
Je ne savais pas qu’il existait des chemins pour accompagner les êtres à se retrouver, à s’ouvrir, à guérir autrement.
Et pourtant, c’était déjà cela que je portais : le désir profond de permettre à chacun de naître à qui il est.
Après cette révélation, je n’ai pas tout de suite trouvé la forme exacte de mon accompagnement.
Le fil était là, plus clair, plus vibrant… et il a continué à me guider.
J’ai accompagné des personnes en reconversion, des chômeurs, des entrepreneurs.
Des publics différents, des contextes variés.
Et pourtant, la même intention traversait tout ce que je faisais : aider chacun à retrouver son élan, à renouer avec sa boussole intérieure, à se remettre en mouvement depuis un lieu juste.
Ces étapes m’ont permis d’affiner ma posture, d’approfondir mes outils, de me confronter aussi à mes doutes.
Elles m’ont surtout aidée à me dégager des “il faut” extérieurs, des injonctions professionnelles, des modèles figés de ce qu’est un “bon accompagnement”.
Peu à peu, j’ai appris à faire confiance à qui je suis, à ce que je perçois, à la manière singulière dont je relie les choses.
Ce rêve d’âme s’est révélé comme une image qui se précise à chaque passage de pinceau.
Il n’a cessé de se redessiner, jusqu’à prendre aujourd’hui une forme qui me ressemble profondément.
Avec le recul, je ne crois pas m’être trompée de rêve.
Je crois plutôt que je me suis approchée, couche après couche, de ce qui m’appelait vraiment.
Le rêve de devenir sage-femme portait déjà en lui l’élan fondamental qui m’anime aujourd’hui :
accompagner une naissance.
Pas celle d’un bébé… celle d’un être à lui-même.
Et cette douleur initiale – de voir un être empêché par son environnement – est restée la même.
Elle s’est simplement déplacée, du tout début de la vie à ce moment si précieux où l’on choisit enfin de redevenir vivant.
Alors, non… je ne me suis pas trompée de rêve.
Je l’ai écouté, ajusté, revisité, jusqu’à ce qu’il m’emmène là où je suis vraiment chez moi.
Parce que réaliser un rêve, ce n’est pas cocher une case.
C’est souvent le laisser nous transformer, jusqu’à ce qu’il trouve sa forme la plus juste.
Et parfois, cela prend le temps d’une vie – ou plusieurs passages de pinceau.
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