La loyauté invisible : à qui restons-nous fidèles quand nos valeurs s’opposent à notre travail ?

Femme en quête de sens, en réflexion sur son travail et ses valeurs – loyauté intérieure et réalignement personnel
Ce n’est pas toujours la charge qui épuise, c’est la dissonance entre ce qu’on fait et ce qu’on croit juste. À qui restons-nous fidèles quand nos valeurs ne trouvent plus leur place ?

Fais circuler ce qui vibre 

Petite intro audio !

1. Le malaise silencieux

Elle s’appelait Sophie, et elle aimait son métier.
Serveuse depuis des années, elle connaissait bien les codes du service, les gestes rapides, les sourires sincères, le lien simple avec les clients habitués.
Elle aimait ce rythme vivant, cette présence dans l’instant.

Et puis, elle est devenue maman.
Ce qui avait du sens pour elle jusque-là – les horaires décalés, les soirées tardives, les journées coupées – devenait difficilement conciliable avec sa nouvelle réalité familiale.
Être disponible pour son enfant passait désormais avant tout.

Quand je l’ai rencontrée, elle était dans cette zone floue :
celle où l’ancien métier n’est plus possible, et où rien de nouveau n’est encore là.
Elle avait une idée claire : elle voulait se former à un autre métier.
Construire autre chose, pour elle, pour son enfant, pour leur avenir.

Et pourtant, le cadre dans lequel j’exerçais ne laissait que peu de place à cette démarche.
Il fallait retrouver un emploi rapidement, et surtout, dans son domaine d’expérience.
La serveuse devait redevenir serveuse.
Même si cela voulait dire travailler dans une cafétéria sans pourboires.
Même si cela ne nourrissait plus rien en elle.

Ce jour-là, j’étais censée l’“accompagner vers l’emploi”.
En réalité, je sentais une tension monter à l’intérieur.
Une forme d’injonction silencieuse : aider, oui — à condition de ne pas écouter trop profondément.
Parce que si j’allais au fond, je risquais de voir ce que ce système ne voulait pas entendre.

Ce n’était pas une fatigue physique.
C’était une fatigue d’âme.
Celle qui naît quand on avance en désaccord discret avec ce qui nous anime.
J’étais loyale à ma mission, et pourtant, quelque chose en moi se déliait.

2. La loyauté : ce fil invisible qui parfois nous étouffe

Ce que j’ai compris plus tard, en repensant à cette situation avec Sophie,
c’est que je n’étais pas seulement en tension avec le cadre…
J’étais en tension avec moi-même.

Avec mes valeurs, avec mes rêves, avec ma vision du monde.
Déjà à l’époque, je croyais profondément que chacun pouvait avoir une place juste,
et en vivre.
C’était un rêve très fort, très intime.
Celui d’un monde où on n’est pas obligé de rentrer dans une case pour exister.
Un monde où l’on peut vivre de ce qui nous ressemble,
avec nos forces et nos fragilités.

Et pourtant, dans mon travail de l’époque,
ce rêve devait rester silencieux.
Je remplissais les dossiers.
J’avançais dans les procédures.
Je faisais ce qui était attendu.

Pas parce que j’étais d’accord.
Parce qu’il fallait bien vivre.

Ce poste payait mon loyer, mes courses, mes trajets.
Je n’avais pas d’autre option claire devant moi.
Alors je faisais ce que beaucoup font :
je maintenais l’équilibre fragile entre ce que je sentais juste,
et ce que je devais faire pour tenir debout.

Et dans cet entre-deux, je me suis souvent demandé :
comment être vraie avec moi-même,
tout en me sentant en sécurité ?

Je me suis longtemps battue avec ce paradoxe.
Je croyais qu’il fallait choisir :
soit mes valeurs, soit la stabilité.
Aujourd’hui, je vois que ce n’est pas une guerre intérieure,
c’est une question de choix.

On peut choisir de continuer un travail qui ne nourrit pas complètement nos valeurs,
en sachant pourquoi on y reste —
pour la stabilité, pour l’argent, pour la transition.
Et on peut aussi décider, à un moment, de réajuster.

Ce rêve que je portais alors,
il ne m’a jamais quittée.
Il a mis du temps à prendre forme.
Et c’est justement parce que j’ai traversé ces tensions-là
que mon activité aujourd’hui a du sens :
permettre à chacun d’être pleinement lui-même,
de sentir sa place juste,
et d’oser l’incarner peu à peu, à sa manière.

3. Quand aider abîme : le paradoxe des métiers du sens

Pendant une quinzaine d’années, j’ai travaillé dans des structures mandatées pour accompagner des personnes en recherche d’emploi.
Sur le papier, c’était clair : soutenir, guider, remettre en mouvement.
Dans la réalité, c’était plus ambivalent.
Parce qu’au fil du temps, j’ai vu glisser la mission d’accompagnement vers une autre exigence :
celle de produire des résultats.

Il fallait remettre les gens au travail vite,
quelle que soit la qualité de ce travail,
quelle que soit la réalité de leur situation.

Ce paradoxe est particulièrement douloureux dans les métiers qui ont du sens :
ceux qui sont censés écouter, soigner, guider, accompagner.
On y entre souvent avec l’élan du cœur,
le désir de contribuer à un monde plus humain.
Et puis un jour, on réalise que ce qu’on nous demande,
ce n’est plus seulement d’être en lien…
c’est de cadrer, d’orienter, de faire avancer coûte que coûte,
de rédiger des rapports, de remplir des statistiques,
de faire en sorte que chaque personne entre dans un processus standardisé,
même quand ce processus ne lui correspond pas.

Et c’est là que l’usure commence.
Pas l’usure des heures.
L’usure du cœur.

J’ai vu des personnes pleines de bonne volonté se sentir invalidées parce qu’elles ne cochaient pas les bonnes cases.
J’ai vu des parcours riches être réduits à des grilles d’évaluation.
Et je pense ici aux CV, ces documents censés nous “valoriser” —
alors qu’ils nous contraignent à entrer dans un format figé.
On nous dit sans cesse “démarquez-vous”,
et dans le même temps, il faut suivre les rubriques, les modèles, les mots-clés.
Quand on a un parcours atypique, cela devient un exercice de camouflage.
Alors qu’un regard différent, une trajectoire singulière,
pourraient être des atouts précieux pour un poste, une équipe, une entreprise.

Et je me suis vue, moi aussi,
prise dans ce système.
À devoir justifier ce que je savais incohérent.
À devoir “faire avancer” quelqu’un qui, en réalité, avait besoin de s’arrêter, souffler, comprendre ce qu’elle vivait.

… Ce n’était pas prévu dans le modèle.

4. Le sens perdu n’est pas une panne

Je ne saurais pas dire à quel moment, exactement, j’ai senti que le sens s’effilochait.
Ce genre de chose ne se voit pas tout de suite.
On continue à faire, à s’investir, à tenir son rôle.
Et puis, un jour, tout devient flou.
On fait les gestes, on suit les horaires, on remplit les cases,
et quelque chose à l’intérieur devient silencieux.

Je n’étais pas en burnout.
Je n’étais pas en arrêt.
Je faisais ce qu’il fallait.
Et pourtant, je sentais que ce que je faisais ne me faisait plus sens.

Il y avait cette impression étrange d’être à côté de moi-même.
D’être efficace, oui, et déconnectée.
De remplir une fonction, sans plus vraiment y être présente.
De soutenir des gens à avancer… sans savoir dans quelle direction je marchais moi-même.

À cette époque, je croyais encore que ce vide était un problème.
Un bug.
Une faille dans mon engagement.
J’en voulais presque à mon ressenti de me mettre en tension,
alors que “tout allait bien”.

Aujourd’hui, je le vois autrement.
Avec le recul, je sais que ce silence intérieur n’était pas une panne… c’était un signal.
Une forme de message muet de ma part la plus vivante.
Un appel à réajuster.
Pas à tout quitter d’un coup —
simplement à écouter.
À me réaligner, fil après fil.
À reconnaître que le rêve que je portais – celui d’un monde où chacun peut vivre une place juste – ne s’était pas éteint.
Il s’était juste mis en veille,
le temps que je sois prête à lui refaire de la place.

Cercle de partage ou d’accompagnement collectif – espace de résonance et de reconnexion à soi

5. Se reconnecter à soi n’est pas simple — surtout seule

Quand on est en plein dans une tension intérieure,
ce n’est pas toujours facile d’en saisir l’origine.
On sent que quelque chose serre,
on sent que ça ne vibre plus,
on sent que l’élan est comme ralenti…
et on ne sait pas forcément pourquoi.

J’ai longtemps cru que je pouvais “trouver” seule ce qui n’allait pas.
J’ai cherché. Écouté. Noté. Observé.
Et parfois, ça aidait.
Souvent, ce n’était pas suffisant.
Parce que quand on est dedans, on est dedans.
Il manque la perspective.
Il manque l’espace.

Je me suis aussi rendu compte que certains échanges, parfois très simples, m’aidaient à clarifier.
Une discussion avec une amie, une remarque, une question ouverte…
Et tout à coup, un fil se remettait en mouvement.
Je comprenais mieux. Je voyais plus clair.

Ces échanges-là, je ne voulais pas les provoquer tout le temps.
Je ne voulais pas peser sur mes proches,
ni transformer chaque conversation en mini coaching informel.
Et là encore, je suis restée longtemps loyale à une certaine image de moi :
celle qui gère, qui sait faire seule, qui accompagne les autres — pas forcément elle-même.

Ce dont j’avais besoin,
ce n’était pas de conseils,
c’était d’un espace fait pour ça.
Un espace où l’on vient avec sa question, son flou, son “je ne sais pas”,
et où l’on sait que tout est bienvenu.

C’est de ce manque-là qu’est née mon envie de créer des espaces collectifs.
Pas pour transmettre un contenu,
pour offrir un cadre,
où la résonance peut faire son œuvre.

Je suis experte de l’accompagnement.
J’ai formé, coaché, écouté, transmis.
Et pourtant, plus j’avance, plus je choisis la facilitation.
Non pas parce que je manque d’outils,
plutôt parce que je crois profondément que la transformation vient de l’intérieur.
Et que le rôle du cadre, c’est de soutenir cette émergence.

Pas besoin d’un sachant.
Parfois, il suffit d’un espace vivant, bien tenu, où chacun peut être traversé par ce qui le touche.
Un mot. Une histoire. Un silence partagé.
Et tout à coup, ce qu’on n’arrivait pas à formuler,
devient limpide.
Et une autre forme de loyauté peut alors émerger : une loyauté à ce qu’on ressent vraiment.

6. Rétablir la loyauté juste

Pendant longtemps, j’ai cru qu’il y avait un choix à faire.
Être en sécurité ou être alignée.
M’adapter au cadre ou suivre mon élan.
Continuer un travail alimentaire ou tout quitter.

Ce que j’ai découvert peu à peu,
ce n’est pas qu’il faut forcément choisir l’un contre l’autre,
le vrai choix est qu’il est possible de réajuster.
De mettre de la conscience dans ce qui guide nos décisions.
De sortir de l’automatisme.
Et de reprendre doucement la main.

Rétablir la loyauté juste,
ce n’est pas tout envoyer valser.
C’est parfois simplement poser une question différemment,
exprimer un doute qu’on n’osait pas dire,
se demander à quoi, exactement, on est en train d’être fidèle en ce moment.

Est-ce que je reste ici par peur ?
Par habitude ?
Par fidélité à une image de moi ?
Ou parce que, pour l’instant, c’est ce qui me permet de construire la suite ?

Rétablir la loyauté juste,
c’est redonner une place à ce qui a du sens,
même si ce n’est pas encore visible dans l’action.
C’est honorer une intuition,
suivre un élan même discret,
laisser respirer ce qu’on avait mis de côté.

C’est aussi reconnaître que certaines loyautés ont été utiles,
qu’elles nous ont protégées, soutenues, stabilisées…
et qu’il arrive un moment où elles ne servent plus notre mouvement de vie.

Ce moment-là,
ce n’est pas une rupture.
C’est un passage.
Une bascule fine,
vers quelque chose de plus vrai.

7. De la loyauté à la joie : l’élan retrouvé

Il y a des passages où rien ne semble bouger à l’extérieur,
et pourtant, à l’intérieur, quelque chose se réorganise.
Un tri subtil s’opère.
Des fils se dénouent.
Un espace s’ouvre.

Et peu à peu, un élan revient.
Pas une injonction à changer sa vie.
Pas un grand plan à exécuter.
Juste un souffle plus vrai.
Un “oui” à soi qui reprend sa place.

C’est cela que j’ai traversé.
Et c’est cela que je facilite aujourd’hui.

Des espaces pour ralentir,
écouter ce qui cherche à se dire,
oser voir ce qui ne nous nourrit plus,
et retrouver la joie d’agir en cohérence.

Une rencontre offerte, L’Élan-Vie,
pour goûter à cette approche,
sentir l’énergie du cercle,
et se laisser toucher par la résonance.

Et pour celles qui souhaitent aller plus loin,
Capt’Être est un accompagnement collectif vivant,
où l’on avance ensemble, sans pression,
dans un cadre soutenant, clair,
où chacune peut revenir à ce qui fait sens pour elle.

Au fil des rencontres, on clarifie ce qui nous anime,
on apprend à reconnaître ce qui vibre juste,
et l’on retrouve la capacité de faire des choix alignés,
d’oser des ajustements qui respectent notre rythme et notre vérité.

Et quand ce fil intérieur se retisse…
la joie revient.
Pas une joie bruyante ou euphorique —
une joie profonde, tranquille,
celle d’habiter à nouveau sa vie de l’intérieur.

C’est souvent là que la vie recommence à circuler.

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