Il y a des contes qui nous parlent comme un miroir ancien.
Des histoires qui ne cherchent pas à nous convaincre, simplement à nous révéler quelque chose que nous savions déjà, quelque chose que la vie chuchote depuis longtemps.
Après avoir exploré la façon dont nos blessures gouvernent parfois nos choix politiques et nos réactions au monde, j’ai senti l’appel d’un autre langage.
Une respiration plus vaste, plus symbolique.
Une manière de dire ce que les mots trop directs n’arrivaient pas à contenir.
Alors je reviens à une source qui traverse les siècles : le conte de l’arbre aux deux branches, millénaire et brûlant d’actualité.
Un conte qui parle de nous, de ce que nous voulons protéger, de ce que nous avons peur d’approcher, de ce que nous sacrifions parfois sans comprendre que ce sacrifice atteint notre propre racine.
1. Le conte : l’arbre qui donnait la vie… et la mort
Dans un village du sud de l’Inde se tenait un arbre prodigieux.
Pas un géant dressé vers le ciel : un arbre simple, avec deux grandes branches charpentières, ouvertes comme deux bras.
Un arbre vénéré, entouré d’offrandes, de prières, de passages d’enfants, d’oiseaux, d’amoureux.
Sur chacune de ses deux branches poussaient des fruits sublimes : dorés, juteux, presque irréels.
Et pourtant, personne n’y touchait.
Car un secret courait dans tout le village :
une des deux branches donnait la vie, l’autre la mort.
Les fruits étaient identiques et la mémoire du village avait oublié de quel côté se trouvait le danger.
Un jour de famine, alors que les réserves étaient épuisées, un jeune homme courageux décida de risquer sa vie pour les siens.
Silence sur la place.
Il s’avança vers l’arbre.
Choisit la branche de droite.
Croqua dans le fruit.
Il resta vivant.
Alors les villageois se ruèrent sur cette branche et se nourrirent joyeusement.
Puis vint la tentation.
Ils se sentirent soudain victorieux.
Libérés de la peur.
Provocateurs devant l’autre branche.
Alors ils tranchèrent la branche “dangereuse”, pour s’assurer de ne plus jamais trembler.
Le lendemain, les fruits de la branche vivante gisaient au sol, pourris.
L’écorce se racornit.
Les feuilles se flétrirent.
L’arbre mourut.
L’arbre mourut.
L’arbre mourut.
2. Ce que nous faisons disparaître en croyant nous protéger
Ce conte n’est pas une fable morale.
C’est un miroir.
Chaque fois que nous supprimons une part de nous pour “sécuriser” notre vie, quelque chose en nous se dessèche.
Chaque fois que nous coupons ce qui nous dérange – une émotion, une mémoire, une peur, un doute, une colère – une branche intérieure perd sa sève.
Nous croyons avancer vers la paix.
Nous avançons vers la stérilité.
À l’échelle personnelle, cela ressemble à :
“Je ne veux plus jamais sentir cette colère.”
“Je refuse cette tristesse.”
“Je ne veux plus entendre cette part de moi.”
“Je veux être seulement lumineuse.”
À l’échelle collective, cela ressemble à :
“Les gens comme ça détruisent la société.”
“Ce camp est bon, l’autre est mauvais.”
“Il faut éradiquer ce qui nous fait peur.”
Nous créons des mondes amputés.
Des arbres sans contraste.
Des vies où une seule branche tente de porter tout l’équilibre.
Et comme dans le conte, cette branche finit par manquer de sève.
3. L’ombre que l’on coupe devient une lumière qui s’éteint
Il y a peu, j’ai abordé l’angle politique sous un autre prisme : celui des blessures qui gouvernent nos réactions, nos choix, nos peurs et nos élans.
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Le conte vient éclairer cette réflexion d’une autre façon, en profondeur, comme si une vieille sagesse posait une main tranquille sur ce qui nous bouscule.
Il montre que tant que nous cherchons à supprimer ce que nous qualifions de “mauvais”, nous touchons à l’équilibre même du vivant.
Une seule branche, même magnifiquement nourrie, ne peut porter un arbre.
La vie respire à travers deux polarités :
ombre et lumière,
peur et courage,
échec et désir,
élan et lenteur,
intuition et discernement.
Le danger ne vient pas de la branche réputée empoisonnée.
Il commence quand nous refusons d’en comprendre la fonction.
L’arbre du conte était vivant parce qu’il contenait deux vérités.
Nous le sommes aussi.
4. Quand le monde polarise, notre arbre intérieur appelle l’unité
Le monde actuel adore les certitudes.
Il adore dire “ici le bien, là le mal”.
Il adore couper.
Éliminer.
Simplifier jusqu’à l’absurde.
Cette polarisation nous épuise, elle épuise aussi nos relations, notre créativité, nos élans les plus précieux.
Nous sommes nombreuses à sentir cette faim intérieure, cette fatigue d’être tirées d’un côté puis de l’autre, sans trouver un espace où poser nos racines.
Nous voulons une troisième voie, une voie vivante, une voie entière.
Le conte nous la montre :
une troisième voie naît quand on assume les deux premières.
Quand on les regarde.
Quand on ne tranche pas.
Quand on apprend à discerner sans éliminer.
5. La créativité naît toujours entre deux branches
Le rêve d’âme, l’élan intérieur, l’expression créative… tout cela s’épanouit dans l’espace entre deux pôles.
Si tu supprimes ce qui te dérange, tu supprimes ta source.
L’inspiration jaillit souvent d’une tension fertile :
une peur à apprivoiser,
une mémoire à écouter,
une émotion à rencontrer,
un désir encore timide.
Supprimer un pôle revient à stériliser le mouvement.
C’est rendre impossible la danse.
C’est transformer le vivant en statue.
Pourtant chaque être humain porte un arbre intérieur qui demande cette respiration :
deux branches, deux vérités, deux élans.
6. La question qui change tout : quelle branche as-tu tenté de couper ?
C’est la question intime, simple, presque nue :
qu’as-tu essayé de supprimer en toi pour survivre, être aimée, être correcte, être efficace ?
Parfois, c’est la colère.
Parfois, c’est la sensibilité.
Parfois, c’est la vulnérabilité.
Parfois, c’est l’intuition.
Parfois, c’est la lenteur.
Parfois, c’est le désir.
Et pourtant chacune de ces parts porte une clé.
Une vérité.
Une force.
Une sève.
Si une part a été coupée, l’arbre intérieur appelle simplement à la retrouver.
Non pour la glorifier.
Pour la reconnaître.
Pour la réintégrer dans le vivant.
7. Une invitation pour toi : retrouver la branche oubliée
Tu peux prendre un instant.
Respirer.
Imaginer ton arbre intérieur, ici, maintenant.
Deux branches.
Deux vérités.
L’une porte des fruits familiers.
L’autre porte des fruits que tu ne connais pas encore.
Et si la vie te proposait aujourd’hui de ne rien couper ?
De faire confiance à la totalité de ce que tu es ?
De laisser revenir cette part que tu avais mise de côté ?
Alors quelque chose s’ouvre.
Un élan léger.
Une clarté simple.
Une paix profonde.
Une vitalité qui revient depuis la racine.
8. Mise en mouvement
Pour aller plus loin, tu peux t’offrir une minute pour sentir :
De quoi ton arbre intérieur a-t-il besoin pour retrouver sa forme entière ?
Un peu d’écoute ?
Un peu de nuance ?
Un peu de courage ?
Un peu de vérité ?
Un peu d’accueil ?
Et si tu veux continuer cette exploration dans un espace vivant et collectif, l’Élan-Vie t’ouvre une place, un temps, une respiration.
C’est une façon vraie de retrouver ta branche oubliée, celle qui nourrit ton rêve d’âme, ton élan, ta présence au monde.
Infos & inscription : https://jemexprime.com/elan-vie


